• Le diocèse de Bayonne rappelle ce qu'a été l'Inquisition

    Sur le site du diocèse ( cliquer sur le lien)

     

    Inquisition : Histoire et légendes

    Inquisitio, la série télévisée diffusée cet été par France 2, a connu un (relatif) succès d’audience. Il n’en reste pas moins que cette « fiction » qui véhicule bien des stéréotypes, contribue une fois encore à donner de l’Eglise catholique et de son histoire, une image qui ne correspond guère à la réalité.

     
             
     

    Il y eut toujours des légendes tenaces dont l’origine est inconnue du grand public et qui abîment l’image historique de l’Église. Il en est ainsi de l’Inquisition, des croisades, du sac de Béziers ... Une série télévisée, « Inquisitio », diffusée cet été sur une chaîne de service public condense ainsi sur l’Inquisition tous les stéréotypes, les plus abominables que l’on puisse imaginer. Tous les clichés sont réunis pour rendre détestable cette institution devenue synonyme de tribunal arbitraire et violent des âmes. Or, il faut toujours soupçonner dans les opinions trop unanimes dans la curée quelque intention maligne empruntée plus à la légende fabuleuse qu’à l’histoire réelle. Reconnaissons que la série « Inquisitio » fait encore plus fort dans la démesure, et plus extravagant. Les personnages, véritables caricatures répugnantes -physiquement et plus encore dans leurs comportements- sont en tous points invraisemblables : borgne, haineux, dépourvus de bon sens et d’humanité, immodérés dans leurs expressions et leurs sentiments, névrosés, luxurieux en diable, furieux et prodigieusement superstitieux, monstrueusement cruels, dépravés etc. Que reste-t-il de vraiment religieux, chrétien, dans ces clercs exaltés en proie au délire du fanatisme ? L’Église eût été vite désertée et ruinée si elle n’avait présenté que de tels types de personnages psychopathes et frénétiques. À l’inverse, les non-catholiques de la série sont doux, gracieux, séduisants, en un mot aimables : une caricature manichéenne flagrante et insoutenable. Il y a, n’en doutons pas, une intention perverse derrière le tableau qui nous est offert de l’Inquisition : nous faire réprouver ce tribunal afin de douter aussi de l’Église qui le créa. Mais qu’était donc exactement l’inquisition ?

    Éviter l’anachronisme

    Plaçons nous d’abord, comme il convient afin d’éviter l’écueil d’anachronisme et de jugement moral dénué de la perspective historique, dans le cours de la société médiévale ; faute de le faire nous jugeons avec des critères sociaux actuels des faits passés de plus de quatre cents ans : Au Moyen Age la société est chrétienne. Il est impensable de ne pas l’être. Le concept de liberté religieuse est incompréhensible, autant que le relativisme moral. On est chrétien parce qu’on est convaincu de la Vérité du Christianisme. Toute hérésie issue du christianisme est considérée comme une rupture de l’unité de pensée, périlleuse pour la société ; d’autant que la Méditerranée et tout le sud européen sont devenus musulmans en quelques dizaines d’années, ainsi que la moitié de l’Espagne. Des poussées religieuses gnostiques se produisent, porteuses de mœurs perçues comme redoutables : le catharisme prône le suicide comme sacrement (endura), le refus du mariage & de la procréation (car le monde est mauvais), c’est la voie de l’extinction de toute société humaine.

    Ce que fut l’Inquisition

    Ce fut un tribunal ecclésiastique destiné à juger les hérésies parmi les catholiques. Jamais, contrairement aux fausses idées reçues, ce tribunal n’eut juridiction sur les fidèles des autres religions, juifs ou musulmans ; il ne jugea que les faux convertis de ces deux religions qui simulaient le catholicisme en continuant leurs pratiques antérieures. Comme le nom l’indique « inquisition » signifie « enquête » car le droit -nouveau et moderne- sur lequel était fondé la procédure était basé sur l’enquête, contrairement aux autres tribunaux d’alors qui se fondaient sur l’accusation, la dénonciation, le soupçon, l’arbitraire et l’aveu souvent obtenu par la torture. Comme toutes les justices il y eut des abus et des erreurs : comment jugera-t-on notre justice si l’on se réfère seulement aux procès d’Outreau, à l’affaire Seznec, à la piteuse affaire de Bruay-en-Artois, aux erreurs judiciaires et aux exécutions capitales avant l’abolition (récente) de la peine de mort ? On ignore délibérément que c’est l’Inquisition qui a inventé : l’avocat de la défense, jusque-là inconnu dans les procédures judiciaires civiles, le recours aux témoignages alors qu’on se contentait jusque-là des aveux (spontanés ou forcés) ou des dénonciations, la présence obligatoire du médecin lors des tortures, le recours exceptionnel et modéré à la torture qui ne devait pas excéder la durée d’un quart d’heure, la vérification scrupuleuse des dénonciations et les confrontations du prévenu et du dénonciateur, la récusation des témoins par les accusés. Enfin, l’abjuration du prévenu suffisait à une condamnation très allégée.

    On passe toujours sous silence que les tribunaux de l’Inquisition étaient préférés par les prévenus aux tribunaux royaux civils ou pénaux en raison de leur procédure plus douce, de leurs investigations plus soigneuses et plus justes et de leurs sentences toujours plus débonnaires. Sait-on que lors des procès intentés aux Templiers après leur arrestation en octobre 1307, ces derniers réclamèrent le jugement de l’Inquisition que le Roi Philippe le Bel refusa ?

    L’Inquisition et l’exagération des chiffres

    Les adversaires de l’Église affectionnent toujours l’enflure des chiffres ; on parle souvent du chiffre de « millions » de morts victimes de l’Inquisition espagnole (d’ailleurs plus royale que d’église). Absurde , bien sûr : L’historien célèbre Pierre Chaunu, protestant, fait remarquer que « la Révolution française a fait plus de morts en un mois au nom de l’athéisme que l’Inquisition au nom de Dieu pendant tout le Moyen-Âge et dans toute l’Europe » et l’auteur protestant anglais William Cobbet écrit aussi dans « Histoire de la Réforme en Angleterre » : « Pendant toute la durée de son existence, ce redoutable tribunal (de l’inquisition en Espagne) n’a pas infligé à beaucoup près autant de supplices que la bonne et glorieuse reine vierge en une seule année de son règne. »

    Enfin n’omettons pas de noter que l’Inquisition préserva les pays où elle eut à s’exercer des terribles et meurtrières guerres de religion qui ravagèrent la France et l’Allemagne pendant cinquante ans (au prix de centaines de milliers de victimes). « Il faut cependant dire que l’inquisition a été un progrès, car plus personne ne pouvait être jugé sans un inquisitio, c’est-à-dire sans qu’il y ait eu un examen, une enquête. » (Déclaration du cardinal Joseph Ratzinger, dans l’émission Contrastes du 03 mars 2005 sur la chaîne de télévision allemande ARD).

    Jacques Camredon 



    « L’Inquisition fut la réaction de défense d’une société pour laquelle, à tort ou à raison, la préservation de la foi paraissait aussi importante que de nos jours celle de la santé ».

    Régine Pernoud, Historienne du Moyen Âge. 



    « Si l’Inquisition espagnole avait été un tribunal comme les autres, je n’hésiterais pas à conclure, sans crainte de contradiction et au mépris des idées reçues, qu’elle leur fut supérieure. Plus efficace à n’en pas douter, mais aussi plus exacte, plus scrupuleuse. Une justice qui pratique un examen attentif des témoignages, qui accepte sans lésiner les récusations, par les accusés, des témoins suspects, une justice qui torture fort peu, une justice soucieuse d’éduquer, d’expliquer à l’accusé pourquoi il a erré, qui réprimande et qui conseille, dont les condamnations définitives ne frappent que les récidivistes. »

    Bartolomé Benassar, historien, président de l’université de Toulouse, "L’Inquisition espagnole", Hachette 1979. 


    « C’est à Jaime Contreras et à Gustav Henningsen que nous devons les efforts les plus sérieux pour évaluer le nombre des victimes de l’Inquisition espagnole. Ces deux historiens estiment qu’entre 1540 et 1700 le Saint-Office a poursuivi 49 092 individus. En procédant à des extrapolations pru¬dentes pour les époques antérieure et postérieure, ils calculent qu’au total 125 000 procès ont été intentés. C’est trois fois moins que ne le suggérait Llorente. Dans ces procès, les propos mal sonnants et les blasphèmes représenteraient 27 % du total ; on trouverait ensuite le « maho¬métisme » (24 %), les judaïsants (10 %), les luthériens (8 %) et, enfin, les superstitions diverses, dont la sorcelle¬rie (8 %). En ce qui concerne les peines infligées, Contre¬ras et Henningsen estiment que la peine de mort a été votée dans 3,5 % des cas, mais que 1,8 % seulement des condamnés auraient été effectivement exécutés ; les autres auraient été brûlés en effigie. En d’autres termes, entre 1540 et 1700, huit cent dix personnes auraient été exécutées. Nous savons que les condamnations à mort ont été très nombreuses avant 1500 et qu’il y en a eu encore quelques-unes après 1700. Il est donc raisonnable d’éva¬luer à moins de dix mille les condamnations à mort suivies d’exécution prononcées par l’Inquisition au cours de son histoire. On est loin des chiffres habituellement proposés. À titre de comparaison, les guerres de religion en Europe auraient fait des dizaines de milliers de victimes. À elle seule, la Saint-Barthélemy (24 août 1572) en aurait fait au moins trois mille à Paris, plus celles qu’on peut recenser dans d’autres villes de France. »

    La légende noire de l’Espagne" Joseph Pérez, professeur de civilisation de l’Espagne Université Bordeaux III - Fayard 2009.

    Inquisitio : on n’est pas des gogos, retrouvez l’article sur la série télévisée sur le blog de Frigide Barjot

     
         
     


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